Le Président 13 : chef... de gare!

Hilare, le Président sautille devant son immense téléviseur. Il en manque presque de renverser son verre de Châteauneuf du pape blanc. Il stoppe un instant et avale une longue gorgée. Le nectar doré exhale un goût d’une rare profondeur minérale et chaude. Le reportage diffusé parle de Belfort. Le Président recompte dans sa tête ses futurs TGV. Il vient de se commander le plus beau train électrique du monde !

-Lilie, pour Noël je vais jouer au train, je serai le chef de gare.

-Il est joufflu le chef de gare…

-Quoi ? Tu trouves que j’ai encore grossi ?

Pouffant de rire, Lilie préfère ne pas répondre.

Belfort. Les ouvriers viennent de se prendre deux claques. La première avec l’annonce de la fermeture de leur usine, connue quand même depuis 2013 par les « milieux autorisés », la deuxième avec cette commande insensée de21 rames Très Grande Vitesse, qui vont circuler sur des voies à petite vitesse. Rames payées avec leurs impôts. Quelqu’un les prend pour des cons.

Le Président français réfléchit. Le Président des USA a son avion Air Force One. Lui, il aura son train Rail Force One. Un beau train bleu blanc Rouge pour sillonner l’hexagone. Sego sera contente, l’électricité ne pollue pas. Pas de charbon, que du nucléaire.

Belfort. Un petit groupe d’ouvriers discute devant des cafés bien serrés. 4 ans de travail avec des impôts plus lourds, et après ? On rame ? L’aiguillage droit vers le chômage ? L’heure de l’embauche approche, ils quittent le bistrot, en marche vers l’usine. En marche vers quel avenir ?

Le Président finit son verre de blanc. Une nouvelle idée vient de germer.

-Dis donc Lilie, as-tu déjà pris l’hélico ? Et si j’en commandais une douzaine chez Airbus ? Ils viennent de perdre un contrat en Pologne.

Grigny, la Grande Borne. La mafia locale passe à l’action. Son chiffre d’affaire explose, pas question de se laisser filmer même cagoulé. La Grande Borne déclare la guerre à la République Française. Et attaque ses policiers pour les tuer. La République s’émeut. Le Président parle d’un acte inqualifiable et intolérable. Mais la République Française n’a pas dépensé un centime de plus pour sa police. Les choix sont clairs. Des TGV oui, des policiers non. Et le Président priera pour les morts.

Régis, 10/10/2016.